Journalistes et influenceurs : une longue histoire de… Je vous laisse compléter la suite de cette phrase. D’amitié ? De rivalité ? Aujourd’hui, il est difficile de savoir vers quel côté penche la balance. Quoi de mieux qu’un nouvel article de blog pour tenter de démêler tout cela ?
Simple, basique
Pour mieux comprendre la dynamique entre journalistes et influenceurs, revenons aux fondamentaux :
Le journaliste, selon l’Onisep, est un professionnel de l’information. Sa mission : rechercher, vérifier et transmettre les faits, en les rendant accessibles à divers publics via la presse écrite, les médias audiovisuels ou numériques. Sa crédibilité repose sur une analyse rigoureuse et une éthique professionnelle forte.
L’influenceur, quant à lui (toujours selon l’Onisep), est avant tout un créateur de contenu. En se mettant en scène sur des plateformes comme Instagram, TikTok ou YouTube, il capte l’attention de ses abonnés, partage ses avis et crée un storytelling engageant. Son influence repose principalement sur sa capacité à susciter l’identification et la confiance auprès de son audience.
Pour la petite anecdote, le concept d’influenceur, bien qu’il puisse sembler récent, remonte en réalité à 1940. C’est Paul Lazarsfeld, un sociologue américain, qui en est l’initiateur. Lors d’une campagne présidentielle, il suit un groupe de 600 électeurs. Grâce à son enquête, il parvient à prouver que le vote n’est pas forcément un choix individuel mais que les amis, la famille et tout l’entourage des individus suivis ont également un poids sur leur prise de décision. Évidemment, entre-temps, l’évolution des technologies a légèrement transformé le rôle des influenceurs.
Si ces rôles semblent a priori bien distincts, ils s’inscrivent tous deux dans l’écosystème médiatique moderne et répondent à des attentes spécifiques du public. Pourtant, une certaine rivalité semble s’être instaurée entre ces deux figures.
Journaliste ou influenceur : qui privilégier pour une communication réussie ?
La fameuse question à un million de dollars : faut-il privilégier les journalistes ou les influenceurs pour une communication réussie ? Vous connaissez sans doute déjà la réponse : tout dépend bien entendu du contexte, des objectifs et surtout, de l’audience visée. Le choix n’est donc pas si cornélien, mais nécessite une réflexion approfondie où tous ces aspects doivent être bien définis avant d’engager toute prise de décision.
La question de l’audience
Aujourd’hui, force est de constater que les jeunes générations se détournent de plus en plus des médias traditionnels (magazine, télévision, radio) au profit des réseaux sociaux.
Selon le 34ᵉ baromètre Kantar Public, trois quarts des 18-25 ans s’informent d’abord sur Internet. Près de la moitié d’entre eux utilisent même exclusivement les réseaux sociaux pour se tenir informés. Ces plateformes deviennent donc leur porte d’entrée vers l’actualité, avant qu’ils ne soient éventuellement redirigés vers les sites des médias traditionnels.
Dans ce contexte, les influenceurs occupent donc une place essentielle : en tant que figures dominantes des réseaux sociaux, ils ont le pouvoir de mettre en avant ou de passer sous silence certains événements ou médias, de diffuser des informations spécifiques et d’influencer le succès d’un article ou d’une vidéo en particulier. Le secteur de l’influence a donc définitivement pris de l’ampleur. Entre 2019 et 2024, les budgets consacrés à ces campagnes ont plus que triplé pour atteindre une somme colossale, estimée à 24 milliards de dollars.
Cependant, ce détournement des médias traditionnels ne signifie pas un désaveu total. Nombre de jeunes croisent encore les sources d’information, alternant entre contenus journalistiques rigoureux et créations d’influenceurs, répondant ainsi à différents besoins : se divertir, s’informer ou se forger une opinion.
Quelles compétences privilégier ?
Journalistes et influenceurs possèdent tous deux des compétences différentes et sont, de ce fait, difficilement interchangeables.
Le journaliste propose une analyse critique et détaillée, renforçant la crédibilité du produit ou du service mis en avant. Son audience, en quête d’information objective, peut être influencée dans ses décisions grâce à cette rigueur.
En revanche, l’influenceur apporte une approche plus personnelle, accessible et souvent très visuelle (sous format vidéo notamment), idéale pour captiver instantanément une audience prête à s’immerger dans une expérience spécifique. Grâce à leurs récits authentiques et à leurs contenus immersifs, les influenceurs savent éveiller le désir de découverte, un levier clé pour susciter l’engagement.
Le choix de l’un plutôt que l’autre dépendra donc des objectifs de votre campagne de communication que vous vous serez fixés.
Journalistes et influenceurs : les principes de base d’une colocation harmonieuse
Plutôt que de considérer les journalistes et les influenceurs comme des éternels rivaux, pourquoi ne pas se concentrer sur leur complémentarité ?
Le fait de combiner la rigueur du journaliste avec la créativité et l’authenticité de l’influenceur pourrait permettre de maximiser l’impact des campagnes de communication, aussi bien dans les secteurs B2B que B2C.
Par exemple, une campagne pour introduire un nouveau produit sur un marché pourrait bénéficier d’un article de fond dans un média spécialisé, renforçant la légitimité et l’intérêt pour le produit, tout en étant dynamisé par une série de posts sur les réseaux sociaux d’influenceurs, apportant une touche personnelle et engageante. Chez OneChocolate, nos équipes d’attaché.es de presse combinent régulièrement ces deux approches.
Toutefois, la complémentarité journaliste-influenceur ne va pas sans poser des questions de :
- Crédibilité et transparence : les influenceurs, souvent financés par des partenariats, doivent faire preuve d’une transparence accrue pour maintenir la confiance de leur audience. Les journalistes, de leur côté, doivent s’adapter aux divers formats numériques sans sacrifier leur indépendance pour autant.
- Éthique et régulation : alors que les influenceurs gagnent en pouvoir médiatique, de nombreux enjeux éthiques émergent, à, l’image de la lutte contre la désinformation, de l’encadrement des publicités déguisées et du respect des valeurs d’intégrité dans les contenus. Plusieurs régions du monde se sont déjà saisies de ces problématiques ; C’est notamment le cas de l’Europe, qui exige que tous les influenceurs issus des pays membres mentionnent explicitement leurs partenariats commerciaux, ainsi que la société à l’origine de la communication. Par ailleurs, en Chine, la loi sur la cybersécurité impose des restrictions sévères sur les contenus en ligne, avec des sanctions importantes concernant les infractions.
En conclusion
La société et les médias sont tous deux en constante évolution ; jusque-là rien de nouveau. Les révolutions numériques sont de plus en plus nombreuses et de plus en plus rapides, ce qui a pour effet de réduire fortement le temps d’adaptation de chacun. Ainsi, les métiers de l’information et de la communication n’ont d’autre choix que de suivre ce rythme effréné.
Un rapport du Financial Times confirme la transformation des usages liés à l’information : d’ici 2030, les médias et les journalistes devraient s’inspirer des méthodes des créateurs de contenu pour s’adapter aux nouveaux usages. La notion de journalisme comme institution dédiée à éduquer, informer et enrichir le débat public est aujourd’hui fragilisée par des pressions commerciales qui tendent à le pousser vers le divertissement.
S’il est certain que l’influenceur ne remplacera définitivement pas le journaliste, ce dernier devra toutefois s’adapter aux nouveaux outils et supports qui lui sont proposés – voire imposés. Certains journalistes ont déjà pris les devants et montrent la voie d’une fusion des compétences. Hugo Décrypte, par exemple, propose une synthèse efficace entre rigueur journalistique et codes des réseaux sociaux, notamment avec son format court sur TikTok. Ce modèle hybride pourrait inspirer de nouveaux formats adaptés aux attentes des jeunes générations.
Verdict : journalistes et influenceurs sont-ils concurrents ou alliés ? La réponse pourrait bien dépendre de leur capacité à travailler main dans la main !
Lisa Conrard